Cass. 2e Civ., 25 mai 2022, n° 21-10.439 (offre de l’assureur)

Abstract

« Il résulte de ces textes que l’assureur qui garantit la responsabilité du conducteur d’un véhicule impliqué dans un accident de la circulation est tenu de présenter à la victime une offre d’indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice et que lorsque l’offre n’a pas été faite dans les délais impartis par le premier texte, le montant de l’indemnité offerte par l’assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêts de plein droit, au double du taux de l’intérêt légal, à compter de l’expiration du délai et jusqu’au jour de l’offre ou du jugement devenu définitif. L’offre de l’assureur ne peut porter sur des chefs de préjudice dont il ignore l’existence. »

Index

Mots-clés

offre de l’assureur

[...]

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 1er octobre 2020), le 26 août 2011, M. [O] a été blessé dans un accident de la circulation impliquant un véhicule assuré auprès de la société MMA IARD. Une expertise a été ordonnée par le juge des référés et l’expert a déposé son rapport le 27 janvier 2015.

2. M. [O] a assigné la société MMA IARD en réparation de ses préjudices, en présence de la caisse primaire d’assurance maladie du Var et de la société Harmonie mutuelle. Une nouvelle expertise a été ordonnée dont le rapport a été déposé le 12 mars 2018.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Énoncé du moyen

3. La société MMA IARD fait grief à l’arrêt de la condamner, fixant le préjudice corporel global de M. [O] à la somme de 274 383,85 euros et disant que l’indemnité lui revenant s’établissait à 159 065,01 euros, à lui payer, outre la somme de 159 065,01 euros, les intérêts au double du taux légal sur la somme de 274 383,85 euros à compter du 27 avril 2012 jusqu’à l’arrêt devenu définitif et avec anatocisme dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil, alors « que l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que les MMA faisaient valoir que, conformément aux exigences de l’article L. 211-9 du code des assurances, elles avaient formulé une offre d’indemnisation le 23 mars 2015, soit dans les cinq mois de leur connaissance de la consolidation de M. [O] ; que pour estimer qu’aucune offre n’avait été formulée par les MMA, la cour d’appel a déclaré que l’offre du 23 mars 2015 n’aurait pas été communiquée et que M. [O] aurait contesté l’avoir reçue ; qu’en statuant ainsi, cependant que M. [O] produisait lui-même l’offre d’indemnisation du 23 mars 2015 en soutenant dans ses conclusions d’appel que « l’assureur a(vait) formulé pour la première fois une offre d’indemnisation par l’intermédiaire de son avocat le 23 mars 2015 », la cour d’appel, qui n’a par ailleurs pas considéré que l’offre du 23 mars 2015 serait incomplète ou insuffisante, a méconnu les termes du litige et a violé l’article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 4 du code de procédure civile :

4. Selon ce texte, l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

5. Pour condamner la société MMA IARD à payer à M. [O] les intérêts au double du taux légal sur la somme de 274 383,85 euros à compter du 27 avril 2012 jusqu’à l’arrêt devenu définitif, l’arrêt retient que l’assureur n’a pas communiqué l’offre définitive du 23 mars 2015 dont il se prévaut et que M. [O] conteste avoir reçue.

6. En statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions, M. [O] reconnaissait que l’assureur avait formulé pour la première fois une offre d’indemnisation par l’intermédiaire de son avocat le 23 mars 2015 et produisait cette offre aux débats, la cour d’appel, qui a modifié les termes du litige, a violé le texte susvisé.

Et sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Énoncé du moyen

7. La société MMA IARD fait le même grief à l’arrêt, alors « que l’offre d’indemnisation de l’assureur ne peut porter sur des chefs de préjudice qu’il ignore, ce qui doit être apprécié à la date à laquelle cette offre a été formulée par l’assureur et au vu des informations alors portées à sa connaissance ; que la cour d’appel a considéré que les offres d’indemnisation effectuées dans les conclusions des MMA des 5 octobre 2018, 19 avril 2019 et 8 janvier 2020 étaient incomplètes faute de viser les postes de pertes de gains professionnels futurs et d’incidence professionnelle ; qu’en statuant ainsi cependant que, comme elle le relevait, le rapport d’expertise judiciaire du 27 janvier 2015, au vu duquel avait été faite l’offre du 23 mars 2015 et le rapport d’expertise judiciaire du 12 mars 2018 concluaient à l’absence de répercussion de l’accident sur le plan professionnel, le second rapport excluant explicitement l’incidence professionnelle, et aucun des deux rapports ne retenant une perte de gains professionnels futurs, la cour d’appel a violé les articles L. 211-9, L. 211-13 et R. 211-40 du code des assurances. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances :

8. Il résulte de ces textes que l’assureur qui garantit la responsabilité du conducteur d’un véhicule impliqué dans un accident de la circulation est tenu de présenter à la victime une offre d’indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice et que lorsque l’offre n’a pas été faite dans les délais impartis par le premier texte, le montant de l’indemnité offerte par l’assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêts de plein droit, au double du taux de l’intérêt légal, à compter de l’expiration du délai et jusqu’au jour de l’offre ou du jugement devenu définitif.

9. L’offre de l’assureur ne peut porter sur des chefs de préjudice dont il ignore l’existence.

10. Pour condamner la société MMA IARD à payer à M. [O] les intérêts au double du taux légal sur la somme de 274 383,85 euros à compter du 27 avril 2012 jusqu’à l’arrêt devenu définitif, l’arrêt retient que l’offre émise le 5 octobre 2018 est incomplète pour ne pas viser les postes de perte de gains professionnels futurs et incidence professionnelle et est donc assimilable à une absence d’offre, et qu’il en est de même des offres contenues dans les conclusions du 19 avril 2019 et dans celles du 8 janvier 2020 qui sont strictement identiques à celle du 5 octobre 2018.

11. En se déterminant ainsi, sans rechercher si, bien que les experts aient conclu à l’absence de perte de gains professionnels futurs et d’incidence professionnelle, l’assureur avait connaissance de l’existence de ces chefs de préjudice, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur l’autre grief du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il condamne la société MMA IARD à payer à M. [O] les intérêts au double du taux légal sur la somme de 274 383,85 euros à compter du 27 avril 2012 jusqu’à l’arrêt devenu définitif et avec anatocisme dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil, l’arrêt rendu le 1er octobre 2020, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; [...]

References

Electronic reference

« Cass. 2e Civ., 25 mai 2022, n° 21-10.439 (offre de l’assureur) », Actualité juridique du dommage corporel [Online], 24 | 2022, Online since 16 mars 2023, connection on 18 juillet 2025. URL : https://publications-prairial.fr/ajdc/index.php?id=1634

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