La réparation de l’incidence professionnelle est aujourd’hui à l’origine d’un large contentieux.
S’il est parfois difficile, pour certaines juridictions, de différencier cette réparation de celle octroyée à des victimes au titre de la perte des gains professionnels futurs, il est également souvent compliqué, pour certains magistrats, d’apprécier la réalité de ce préjudice, lorsque la victime est une jeune personne, un adolescent voire un enfant.
En effet, par principe, ces jeunes personnes n’exercent aucune activité professionnelle au moment du sinistre.
Comment pourrait-on, dans ce cas-là, les indemniser des incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle ?
C’est le raisonnement que développait, dans l’arrêt commenté, non pas le juge d’appel, mais le Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI), demandeur au pourvoi, pour contester l’indemnisation versée à une jeune fille, victime d’une agression.
Dans cette espèce, le Fonds de garantie, outre le jeune âge de la victime, faisait surtout valoir que celle-ci avait, d’elle-même, cessé d’assister à ses cours, avant l’accident, et abandonné sa scolarité en quittant l’établissement dans lequel elle était inscrite ce qui procédait d’un choix délibéré de sa part.
Pour cette raison, pour le Fonds, aucun élément ne permettait d’objectiver l’existence d’une incidence professionnelle en relation causale avec les faits objets de la procédure (agression).
Ce raisonnement n’est pas suivi, en l’espèce, par la Haute juridiction, pour qui l’incidence professionnelle de la jeune victime ne saurait être considérée comme un préjudice virtuel et hypothétique à partir du moment où la victime, alors âgée de 18 ans, n’était pas destinée à rester inactive toute sa vie et qu’elle pouvait prétendre au minimum au smic.
Sur ce point, la solution est tout à fait logique et se contente de rappeler plusieurs évidences.
Même en ces temps de crise et de chômage de masse, l’accès au marché du travail reste, en effet, tout à fait envisageable et même nécessaire pour qui voudrait normalement subvenir à ses besoins. Si l’absence de diplôme rend, peut-être, plus compliquée l’obtention d’un premier emploi (comme le démontrent certaines statistiques), elle ne saurait constituer un obstacle insurmontable, comme le soutenait ici implicitement le Fonds. En outre, le fait d’avoir abandonné tôt une scolarité ne présage en rien des choix qu’un individu pourra effectuer à l’avenir et il paraît bien excessif de considérer qu’un tel abandon marque une volonté de ne jamais exercer la moindre activité rémunérée. Dans l’arrêt commenté, il était d’autant plus difficile de soutenir un tel raisonnement que la jeune victime avait montré, par ses années de scolarité précédentes, un réel potentiel et une aptitude à exercer un emploi rémunéré que confirmait une attestation de son ancien chef d’établissement.