La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, par un arrêt rendu le 8 décembre 2016, a été amenée à préciser les contours du recours subrogatoire du FGAO.
Rappelons que le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommage est un Fond d’indemnisation qui a pour vocation d’indemniser les victimes d’un accident de la circulation lorsque l’accident a été provoqué par un tiers non identifié ou non assuré. Mais également les victimes d’un accident de la circulation causé, dans les lieux ouverts à la circulation publique, par une personne circulant sur le sol ou un animal.
En l’espèce, Mme X. a été victime en tant que piétonne d’une chute causée par un chien dont le propriétaire n’a pas été identifié ; le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) a conclu avec Mme X. une transaction ayant pour objet de l’indemniser de l’ensemble de ses préjudices. Par la suite, estimant que les complications présentées par la victime étaient la conséquence d’une infection nosocomiale survenue à l’occasion d’une intervention chirurgicale qu’elle avait subi à la suite de son accident, et qu’il était subrogé dans les droits de Mme X., le FGAO a assigné la clinique et l’ONIAM pour être indemnisé des sommes versées en réparation du dommage en lien avec l’infection nosocomiale ;
Il convient de rappeler pour la clarté des explications qu’en matière d’infection nosocomiale, la loi du 4 mars 2002 a instauré un régime de responsabilité duale :
- Une responsabilité de plein droit pesant sur l’établissement de santé et pour faute pour les praticiens libéraux s’agissant des infections nosocomiales les moins graves (L1142-1 I, alinéa 2 du code de la santé publique).
- Une prise en charge de l’indemnisation des infections nosocomiales les plus graves par la solidarité nationale incarnée par l’ONIAM (article L. 1142-1-1 du code de la santé publique).
La cour d’appel a débouté le FGAO, estimant son recours subrogatoire irrecevable en se fondant sur le principe de subsidiarité de l’intervention du Fonds.
En effet, il résulte de l’article L. 421-1 du code des assurances que « lorsque le Fonds de garantie intervient au titre des I et II, il paie les indemnités allouées aux victimes ou à leurs ayants droit qui ne peuvent être prises en charge à aucun autre titre lorsque l’accident ouvre droit à réparation » (pour une application du principe de subsidiarité voir par exemple : Crim., 5 octobre 2010, n° 09-88.692).
Le raisonnement de la cour d’appel était le suivant :
- La subrogation au sens de l’article 1251, 3° du Code civil peut être mis en œuvre au profit de celui qui, étant tenu avec d’autres ou pour d’autres au paiement de la dette, avait intérêt de l’acquitter.
- Le Fonds de garantie n’était pas tenu au paiement des indemnités en lien avec l’infection nosocomiale puisque cela relevait de l’établissement de santé sur le fondement d’un régime d’indemnisation spécifique.
- En conséquence, n’ayant eu aucune raison d’acquitter de telles indemnités et donc la dette de l’établissement de santé, il ne pouvait se retourner postérieurement contre lui et devait donc supporter sur son patrimoine propre le prix de son intempérance.
Cette solution est censurée par la Haute juridiction au motif d’une violation de l’article 1251, 3° du Code civil ancien :
« Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté, d’une part, que le FGAO soutenait que Mme X… avait contracté une infection nosocomiale à l’occasion d’une intervention rendue nécessaire par l’accident du 16 avril 2001, d’autre part, que le FGAO, tenu de réparer les conséquences de l’accident, avait indemnisé la victime de l’intégralité du dommage, ce dont il résultait qu’il avait libéré envers celle-ci la société P. ainsi que MM. Y… et Z… qui avaient, selon lui, contribué au dommage postérieurement à l’accident, la cour d’appel a violé le texte susvisé. »
En d’autres termes, la cour d’appel ne pouvait rejeter le recours dès lors qu’elle avait constaté, elle-même, que la survenue de l’infection nosocomiale est la conséquence d’une intervention chirurgicale rendue nécessaire par l’accident et que le Fonds de Garantie, tenu de réparer les conséquences de l’accident, avait indemnisé la victime de l’intégralité du dommage.
Cette solution est l’application même du principe de causalité de l’équivalence des conditions : le Fonds de garantie a indemnisé la victime de son entier dommage puisqu’il trouve sa source dans un accident qu’il doit garantir. Toutefois, le même principe fonde son droit à agir contre les autres responsables ayant contribué postérieurement au dommage, le Fonds de garantie ne pouvant être tenu de supporter la charge définitive de l’indemnisation incombant à un tiers.