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Résiliation pour faute grave d’un contrat d’agence commerciale pour non-respect d’une clause d’intuitu personae malgré un contrôle de fait

Audrey Clastre


1L’exécution personnelle d’une obligation peut être exigée par le cocontractant en raison de la stipulation d’une clause ou être intrinsèque à la prestation, le débiteur est alors choisi personnellement pour s’exécuter : c’est l’intuitus personae. Le contrat d’agent commercial particulièrement encadré par le Code de commerce est, par sa nature, lié à ce choix personnel et déterminant de la personne de l’agent pour exécuter l’obligation en tant que mandataire.

2En l’espèce, une société avait donné mandat à une autre pour la représenter et vendre ses produits par le biais de son gérant, qui exerçait l’activité d’agent commercial. Ce contrat comportait une clause intuitu personae stipulant que « Tout changement conduisant à la perte (...), soit de la direction effective et permanente de la société, soit du contrôle majoritaire de celle-ci, devra être soumis à l'agrément du mandant au plus tard quatre mois avant la survenance du changement. Le non-respect de cette obligation sera assimilé à une faute grave de l'agent ouvrant droit à la résiliation légitime du mandat. »

3Le mandant a, par la suite, procédé à une rupture du contrat d’agence commerciale pour faute grave pour non-respect de cette clause, entrainant alors une résiliation sans préavis et sans versement de l’indemnité compensatrice prévue par l’article L.134-12 du Code de commerce. Le mandataire, arguant d’un contrôle de fait et d’une connaissance effective de ce contrôle par des échanges peu avant la rupture, saisit le tribunal de commerce pour rupture brutale et demande d’indemnisation.

4Dans un jugement du 22 septembre 2017, le tribunal de commerce de Lyon rejette la demande du mandataire. Celui-ci interjette appel, invoquant une absence de faute grave justificative d’une résiliation anticipée du contrat et le versement d’indemnités compensatrices de préavis et de préjudice.

5La cour constate la faute contractuelle de l’agent commercial et déboute à nouveau la société mandataire. En effet, le gérant n’avait pas informé formellement la société mandante de sa démission, pourtant intervenue lors d’une assemblée générale. De plus, un contrôle de fait ne pouvait l’exonérer du respect de cette clause d’intuitus personae. L’existence de cette faute contractuelle dispensait alors le mandataire de verser l’indemnité prévue par le Code de commerce.

6La cour aurait pu alors se laisser porter par un concept en effectuant une appréciation factuelle de la situation et en admettant que l’ex-gérant bien que démis de ses fonctions gardait bien le contrôle, mais de fait. Elle a préféré se référer aux écrits et à l’inscription du nom du gérant effectif dans les statuts afin d’apprécier le respect de cette clause d’intuitus personae. Elle rappelle alors que l’intuitu personae ne peut être caractérisé par un contrôle de fait.

Arrêt commenté :
CA Lyon, 1re ch. civ. A, 5 décembre 2019, n° 17/07228



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Audrey Clastre, «Résiliation pour faute grave d’un contrat d’agence commerciale pour non-respect d’une clause d’intuitu personae malgré un contrôle de fait», BACALy [En ligne], n°15, Publié le : 01/10/2020,URL : http://publications-prairial.fr/bacaly/index.php?id=2474.

Auteur


À propos de l'auteur Audrey Clastre

Étudiante, M2 droit et pratique des contrats, université Jean Moulin Lyon 3


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