Condamnation du syndicat de copropriétaires et obligation de garantie du syndic

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Mots-clés

copropriété, assemblée générale, délai de convocation, faute du syndic

Rubriques

Droit de l’immobilier

Texte

Un syndic de copropriété délivre à un couple de copropriétaires une convocation d’assemblée générale en date du 23 juin 2015 pour une réunion prévue le 8 juillet suivant dans le cadre du mandat qui lui est confié par le syndicat des copropriétaires. Ce couple domicilié à l’étranger reçoit ladite convocation dans un délai inférieur au délai légal de vingt et un jours fixé par l’article 9 du décret du 17 mars 1967, et sollicite de ce fait la nullité de l’assemblée générale du 8 juillet 2015 en assignant le syndicat devant le tribunal de grande instance, qui appelle en la cause son mandataire.

Le tribunal de grande instance donne raison aux copropriétaires en prononçant la nullité de l’assemblée pour non-respect du délai de convocation, mais rejette leur demande de dommages et intérêts. Le syndicat des copropriétaires, dont l’appel en cause à l’égard du syndic est rejeté, est condamné au paiement d’une indemnité de procédure de 1000 euros ainsi qu’aux dépens. Il décide d’interjeter appel. L’objectif poursuivi est simple : l’appelant estime que son appel en garantie à l’égard de son mandataire n’était pas sans objet, en raison de la condamnation prononcée à son encontre au profit des copropriétaires s’agissant des frais irrépétibles et des dépens, qui trouvait sa cause dans l’absence de diligence du syndic concernant l’envoi de la convocation d’assemblée générale.

La cour devait ainsi se prononcer sur la légitimité de l’appel en garantie formée par le syndicat des copropriétaires à l’encontre du syndic, intimement liée à l’existence d’une faute de ce dernier dans l’exécution du mandat qui lui était confié. À l’issue d’une démonstration claire, la cour d’appel de Lyon prononce la condamnation du syndic à garantir le syndicat des copropriétaires des sommes mises à sa charge au profit des copropriétaires.

La décision reposant sur la détermination de l’existence d’un lien de causalité directe entre la faute du syndic et la condamnation en justice de son mandant, la Cour se prononce logiquement dans un premier temps sur la définition de cette faute, et reprend sur ce point une jurisprudence bien établie. Conformément à l’article 9 alinéa 2 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967, le syndic est tenu de délivrer une convocation à l’assemblée générale des copropriétaires dans un délai minimum de vingt et un jours avant la date de la réunion, sauf exception liée à l’urgence. L’auteur de la convocation doit alors faire preuve de diligence dans l’expédition, en tenant notamment compte de l’aléa lié à l’acheminement du courrier. Le délai attaché à une convocation par lettre recommandée avec demande d’avis de réception a en effet « pour point de départ le lendemain du jour de la première présentation de la lettre recommandée au domicile du destinataire » (article 64 alinéa 1 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967).

Il est ainsi acquis de longue date que toute convocation adressée hors délai engendre la nullité de l’assemblée générale (Cass. civ. 3e, 3 oct. 1974, D. 1975. 130 ; JCP 1975. II. 18007 et 18199 bis, note Guillot ; RTD civ. 1975. 574 ; AJPI 1975. 414 ; Rev. Loyers 1974. 563 ; Gaz. Pal. 1974, II Somm. 275 – Cass. civ. 3e, 14 juin 1984, Administrer févr. 1985. 22), quand bien même le retard ne serait que d’un seul jour (Cass. civ. 3e, 12 avril 1972, n°71-14.032, Bull. civ. III, n°212), ou que le dépassement du délai serait imputable à un dysfonctionnement des services postaux (CA. Paris, 23e ch. B, 3 décembre 1998, RG n°1997/17806, Administrer mai 1999. 5, obs. Bouyeure – CA. Paris 23e ch. B, 6 sept. 2001, RG n°2000/13285, Loyers et copr. Févr. 2002. 42- CA. Paris 21 sept. 2006, AJDI. 2006. 915). Le copropriétaire qui s’en prévaut n’a au surplus pas besoin de rapporter la preuve d’un préjudice personnel subi à cause de l’envoi tardif de la convocation (Cass. civ. 3e, 3 oct. 1974 : préc – Cass. civ. 3e, 17 avril 1991, n°89-19. 290, Bull. civ. III, n°121 ; AJDI 1992. 29 ; D. 1992. Somm. 137, obs. Lafond ; RDI 1991, 380, obs. Capoulade et Giverdon – Cass. civ. 3e, 25 novembre 1998, n°96-20. 863, Bull. civ. III, n°223 ; AJDI mai 1999. 526 obs. Capoulade ; JCP 1999. IV. 1066), et sa présence à l’assemblée générale ne le prive nullement de son droit de demander la nullité de cette assemblée (Cass. civ. 3e, 25 novembre 1998 : préc). La cour d’appel prend soin de rappeler que dans le cas soumis à son appréciation, « la convocation à l'assemblée générale n'a été expédiée aux époux V. que le 15 juin 2015 soit 23 jours avant l'assemblée générale fixée au 8 juillet. Le délai de 21 jours courant à compter du lendemain de la présentation de la convocation recommandée, la remise en temps utile supposait que la convocation soit présentée aux destinataires au plus tard le lendemain de son expédition ».

C’est par conséquent dans la faute du syndic que se trouve la cause de la nullité de l’assemblée générale litigieuse. Au visa de l’article 1992 du Code civil, la cour rappelle que le syndic, en sa qualité de mandataire, répond de sa gestion envers son mandant, le syndicat. Il engage à ce titre sa responsabilité contractuelle (Cass. Civ. 3e, 23 juin 1999, n° 97-17.085 – Cass. Civ. 3e, 17 janv. 2006, n° 04-20.414) en cas de manquement à son obligation de diligence, à plus forte raison lorsqu’il exerce, comme c’est le cas en l’espèce, des fonctions rémunérées (P. Capoulade et D. Tomasin, La copropriété, Dalloz Action, 9éd., 2018/2019, n°341.481).

En toute logique, la cour d’appel de Lyon en déduit que la condamnation du syndicat, défendeur en première instance, au paiement des frais de procédure et des dépens constitue pour ce dernier un préjudice « en relation de causalité directe et certaine avec la faute commise par le syndic ». Il est alors tout à fait justifié que le mandant appelle en garantie son mandataire, et ce pour toutes les condamnations prononcées à son encontre au profit des copropriétaires.

Si cette décision ne présente guère d’originalité, elle apporte tout de même un éclairage singulier sur l’étendue de la responsabilité du syndic envers le syndicat, en invitant ce dernier à ne pas supporter définitivement les conséquences dommageables des fautes de gestion de son mandataire, et ce même dans l’hypothèse où le préjudice subi se limite aux frais irrépétibles et aux dépens.

CA Lyon, 1re ch. civ. B, 15 décembre 2020, n° 19/05034

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Citer cet article

Référence électronique

Simon Journet, « Condamnation du syndicat de copropriétaires et obligation de garantie du syndic », Bulletin des arrêts de la Cour d'appel de Lyon [En ligne], 16 | 2021, mis en ligne le 01 mars 2021, consulté le 16 août 2025. URL : https://publications-prairial.fr/bacaly/index.php?id=2793

Auteur

Simon Journet

Doctorant en droit du patrimoine et droit des contrats, équipe de recherche Louis Josserand, université Jean Moulin Lyon 3

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