Un retard d’une heure et quart à réaliser une césarienne a causé une perte de chance de 50 % d’éviter le décès d’un enfant

Décision de justice

CAA Toulouse, 2e chambre – N° 22TL21732 – Consorts N. – 24 septembre 2024 – C

Juridiction : CAA Toulouse

Numéro de la décision : 22TL21732

Date de la décision : 24 septembre 2024

Code de publication : C

Index

Rubriques

Responsabilité de la puissance publique

Texte

Résumé

Dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou du traitement d’un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d’obtenir une amélioration de son état de santé ou d’échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l’établissement et qui doit être intégralement réparé n’est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d’éviter que ce dommage soit advenu. La réparation qui incombe à l’hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l’ampleur de la chance perdue.

Dès le début de son enregistrement le 20 mars 2014 à 20 heures 03, le rythme cardiaque du fœtus de Mme X était peu oscillant. A 20 heures 40, le médecin a décidé d’en prolonger l’observation avant de prendre une éventuelle décision d’extraction. Rappelé par la sage-femme à 22 heures compte tenu de l’aggravation du rythme cardiaque du fœtus, le médecin a alors décidé du percement de la poche des eaux. Cet acte médical, qui a été reporté à 23 heures 15 dès lors qu’une autre parturiente était déjà prise en charge par la sage-femme en salle de naissance, a révélé un liquide amniotique méconial, conduisant à pratiquer une césarienne en urgence, aux alentours de 23 heures 30. L’enfant a ensuite été transféré en réanimation pédiatrique où il est toutefois décédé, le 1er avril 2014, des lésions neurologiques provoquées par une anoxo-ischémie.

Il résulte des éléments d’information de l’expertise médicale que l’altération du rythme cardiaque fœtal a été observée dès le début de l’hospitalisation de Mme X et que celle-ci était venue consulter pour des contractions survenues depuis environ douze heures. La circonstance que la fiche de consultation prénatale versée au débat fasse mention d’une contraction toutes les cinq minutes à partir de 14 heures n’est pas de nature à infirmer le précédent constat. Alors que l’aggravation du rythme cardiaque fœtal constatée à compter de 22 heures imposait une extraction en urgence, ainsi d’ailleurs que l’avait décidé le médecin, le retard de prise en charge de 75 minutes pour réaliser la rupture de la poche des eaux, aggravant l’hypoxie fœtale, a ainsi compromis les chances de l’enfant d’obtenir une amélioration de son état de santé ou d’échapper à son aggravation. Au regard de l’ensemble des éléments d’information du dossier, la cour, à la suite des premiers juges, a regardé comme établi l’existence d’un état antérieur d’hypoxie et a fixé le taux de perte de chance subi par l’enfant à 50 %.

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