Par cette décision récente du 1er septembre 2015, la chambre criminelle nous rappelle la méthode de calcul à utiliser pour déterminer le préjudice économique d’une victime par ricochet, en l’occurrence ici le conjoint survivant. Si les juges du fond sont souverains en matière d’évaluation du préjudice, encore faut-il, en effet, qu’ils respectent, dans leur méthode de calcul, le principe de réparation intégrale.
C’est par ce biais que la Cour de cassation se permet aujourd’hui de fixer un certain nombre de principes, comme le confirme l’arrêt commenté.
S’agissant de la perte de revenu que peuvent subir les proches en cas de décès de la victime principale, rappelons tout d’abord que la méthode de calcul préconisée par la nomenclature Dintilhac et validée aujourd’hui par la Haute juridiction consiste à calculer le préjudice total du foyer, puis à le répartir entre les membres de la famille.
Après avoir calculé la totalité des revenus qui ont été et qui seront perdus pour la famille en raison du décès, il convient, en principe, de calculer le préjudice total de chaque enfant pour le déduire de ce préjudice total de la famille et déterminer ensuite le préjudice économique du conjoint survivant.
Dans ce travail de soustraction, ne sont, en revanche, pas pris en compte les enfants déjà autonomes au moment du décès de la victime principale.
Ce que n’avait pas respecté, dans l’arrêt commenté, la juridiction du fond qui avait intégré sciemment dans ses calculs un troisième enfant déjà indépendant qui ne constituait plus une charge pour le foyer.
De la même manière, une fois qu’un enfant devient autonome, sa part doit être réintégrée dans le préjudice du conjoint survivant.
À nouveau, cette réintégration avait été oubliée ici par le juge d’appel qui, après avoir déterminé le montant de la perte annuelle du foyer, l’avait réparti entre l’épouse à hauteur de 55 % et les trois enfants à hauteur de 15 % chacun mais avait ensuite capitalisé ces pertes annuelles individuelles de manière viagère pour l’épouse et de manière temporaire pour deux des enfants.
À ce titre, la censure de l’arrêt d’appel est donc, une nouvelle fois, logique.
Pour éviter de minorer le préjudice du conjoint survivant, la méthode la plus juste est en effet, comme le rappelait récemment une autre commentatrice,
« de capitaliser la totalité de la perte annuelle du foyer à titre viager et d’obtenir le préjudice économique du conjoint survivant en effectuant la différence entre, d’une part, la perte annuelle du foyer capitalisée à titre viager et, d’autre part, le préjudice économique de chaque enfant capitalisé de manière temporaire » (L. Priou-Alibert, « Du contrôle par la haute cour des méthodes de calcul des préjudices économiques après décès », Gazette du Palais, 27 octobre 2015, n° 300, p. 44).