La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, par un arrêt rendu le 2 juillet 2015 publié au Bulletin, a été amenée à se prononcer une nouvelle fois sur la déductibilité de la prestation de compensation du handicap (ci-après PCH) des préjudices de la victime.
Rappelons que la PCH, mise en place par la loi du 11 février 2005, est une aide personnalisée versée par le conseil général permettant la prise en charge de certaines aides techniques, humaines ou animalières afin de compenser des handicaps lourds.
Aux termes d’une jurisprudence maintes fois commentée, la Cour de cassation a considéré que la PCH ne se déduisait pas des préjudices de la victime puisqu’elle ne fait pas partie des prestations énumérées par l’article 29 de la loi du 5 juillet 1985 ouvrant droit au recours subrogatoire des tiers payeurs (cf. Civ. 2e, 2 juillet 2015, n° 14-19.797).
Cependant, la Cour a adopté une solution différente à l’égard du Fonds de garantie des victimes d’infractions pénales, reconnaissant la déductibilité de la prestation au motif que l’article 706-9 du code de procédure pénale dispose que la Commission d’indemnisation des victimes d’infraction tient compte, dans le montant des sommes allouées à la victime au titre de la réparation de son préjudice, de certaines prestations énumérées mais également des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d’autres débiteurs au titre du même préjudice (Civ. 2e, 10 décembre 2015, n° 14-24.443 et 14-26.726, F-D, cts B. c/ Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions).
La problématique posée à la Haute juridiction dans l’arrêt commenté se situe dans le prolongement de cette solution. En effet, dès lors que la prestation de compensation du handicap devait être déduite de l’indemnisation allouée à la victime, la tentation était grande pour le Fonds de garantie d’exiger des victimes, qui ne l’avait pas demandé, à la solliciter auprès de la MDPH dans le cadre de la procédure afin de pouvoir la déduire du montant qu’il serait amené à lui verser au titre des frais liés aux handicap (besoin en aide humaine, aménagement du logement…).
En effet, le Fonds de garantie, fort de la jurisprudence de la Cour de cassation précitée qui lui était favorable, estimait que le caractère indemnitaire de la PCH, et par là même son caractère déductible, impliquait une obligation pour la victime de solliciter la prestation, dès lors que le Fonds de Garantie était habilité par la loi à déduire les indemnités reçues mais également à recevoir.
La Cour de cassation, aux termes du présent arrêt, a mis un coup d’arrêt aux tentatives d’interprétation extensive du Fonds de Garantie rappelant qu’une victime ne peut être contrainte à solliciter cette prestation dès lors que les indemnités versées par le Fonds de Garantie ne sont pas subsidiaires à cette dernière :
« Mais attendu qu’ayant exactement énoncé que les indemnités allouées par le FGTI ne sont pas subsidiaires à la prestation de compensation du handicap à laquelle peut prétendre une victime sans qu’elle soit obligée de la demander et qui n’est pas versée par un organisme gérant un régime obligatoire de sécurité sociale, de sorte que, si elle n’a pas été sollicitée, cette prestation ne saurait être considérée comme une indemnité à recevoir au sens de l’article 706-9 du code de procédure pénale, la cour d’appel en a déduit à bon droit que l’exception dilatoire présentée par le FGTI n’était pas fondée. »
Cette jurisprudence a vraisemblablement vocation, compte tenu de la solution générale qui est consacrée, à être transposée pour d’autres prestations telle la pension d’invalidité versée par la CPAM.