Réparation du préjudice d’angoisse de mort imminente

Crim., 27 septembre 2016, n° 15-84.238

DOI : 10.35562/ajdc.832

Index

Mots-clés

préjudice d’angoisse de mort imminente, conscience de la victime

Le préjudice d’angoisse n’est pas consacré par la nomenclature Dintilhac. Il est aujourd’hui seulement reconnu par la jurisprudence. Sa réparation reste, malgré tout, difficile pour plusieurs raisons.

Si la jurisprudence accepte d’indemniser l’anxiété en tant que tel, en principe de simples inquiétudes ne peuvent suffire à justifier une action en réparation. À l’instar de tout autre préjudice, la certitude du préjudice d’angoisse doit être établie. Pour reprendre les termes de la jurisprudence, l’angoisse de la victime doit être réelle et profonde pour être indemnisée.

Le caractère spécifique du préjudice d’anxiété, au même titre que le préjudice spécifique de contamination, justifie une appréciation in concreto.

Il faut qu’un ensemble de faits vienne caractériser cette angoisse.

Cette réalité de l’angoisse peut, dans certains cas, se déduire des circonstances de l’espèce, par exemple lorsque la victime subit un évènement exceptionnel d’une particulière acuité, comme un crash aérien (CA Fort-de-France, ch. Civ., 25 févr. 2011, n° 09/00246) ou un incident industriel (Cass. crim., 23 nov. 2010, n° 09-85.152).

Pour la jurisprudence de telles catastrophes sont susceptibles de générer une angoisse certaine auprès des personnes qui les subissent.

Elle peut sinon être établie par un examen et un certificat médical sous réserve que la victime ne soit pas encore décédée.

Hormis ces hypothèses relativement rares, le juge civil fait généralement preuve de souplesse dans l’appréciation de cette exigence de certitude. Ainsi, s’agissant des victimes de l’amiante, la chambre sociale, depuis une série d’arrêts du 4 décembre 2012 (Cass. soc., 4 décembre 2012, n° 11-26.294), reconnaît un préjudice d’anxiété, chaque fois que le demandeur a été exposé durant son activité professionnelle à des poussières d’amiante. La crainte de contracter une maladie grave, qu’il éprouve au quotidien, mérite en tant que telle réparation. Il importe peu à cet égard, qu’il ait ou non été astreint à des examens réguliers.

Dans tous les cas, en revanche, pour que l’existence du préjudice d’anxiété soit reconnue, il convient de prouver que la personne exposée était bien en mesure de percevoir le risque encouru. Le préjudice d’angoisse étant un préjudice éminemment subjectif, sa réparation suppose par principe que la victime soit dans un état de conscience (Cass. crim. 5 oct. 2010, n° 10-81.743, et n° 09-87.385).

La victime doit présenter une conscience suffisante pour ressentir les douleurs physiques ou morales et envisager sa propre fin. C’est ce que confirme l’arrêt rendu par la chambre criminelle le 27 septembre 2016.

Dans le cas présent, la victime était restée consciente dans les minutes ayant suivi l’accident. Elle avait donc pu percevoir l’imminence de sa propre mort survenue très peu de temps après.

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Référence électronique

Adrien Bascoulergue, « Réparation du préjudice d’angoisse de mort imminente », Actualité juridique du dommage corporel [En ligne], 9 | 2016, mis en ligne le 12 janvier 2017, consulté le 20 avril 2024. URL : https://publications-prairial.fr/ajdc/index.php?id=832

Auteur

Adrien Bascoulergue

Université Lumière Lyon 2, Droit, contrat, territoires, DCT, EA 4573, F-69007, Lyon, France

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