L’applicabilité de l’article L. 111-12 du code de l’urbanisme aux réseaux d’eaux usées

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Décision de justice

CAA Marseille, 1re chambre – N° 20MA00172 – Commune de Cadolive C/ Mme A. et M. B. – 06 avril 2023

Juridiction : CAA Marseille

Numéro de la décision : 20MA00172

Numéro Légifrance : CETATEXT000047421941

Date de la décision : 06 avril 2023

Index

Rubriques

Urbanisme

Résumé

Les dispositions de l’article L. 111‑12 du code de l’urbanisme, qui présentent le caractère de mesures de police de l’urbanisme destinées à assurer le respect des règles d’utilisation du sol, permettent à l’autorité administrative chargée de la délivrance des permis de construire de refuser le raccordement définitif aux réseaux d’eau, lesquels incluent les réseaux d’assainissement en tant que réseau d’eaux usées, d’un bâtiment non régulièrement édifié.

Après avoir déposé une déclaration préalable de division de trois parcelles, à laquelle le maire compétent ne s’était pas opposé, deux particuliers ont sollicité le raccordement au réseau public d’assainissement. Mais le maire a refusé ce raccordement en faisant application de l’article L. 111‑12 du code de l’urbanisme. Le tribunal administratif de Marseille avait annulé cette décision, notamment au motif que ce texte ne permettait pas au maire de s’opposer au raccordement définitif au réseau public d’assainissement. La cour a censuré ce motif, en considérant, au contraire, que l’article L. 111‑12 qui investit l’autorité compétente d’un pouvoir de police, et qui vise les réseaux d’eaux, concerne également les réseaux d’eaux usées.

Mais la cour n’a pas pour autant annulé le jugement : dans le cadre de l’effet dévolutif de l’appel, elle a jugé que la commune n’établissait pas l’irrégularité de la construction à raccorder au réseau d’assainissement, qui aurait pu justifier, en application de l’article L. 111‑12 du code de l’urbanisme, le refus de raccordement.

Conclusions du rapporteur public

Gilles Roux

Rapporteur public

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DOI : 10.35562/amarsada.198

Par la décision en litige, en date du 15 juin 2017, le maire de Cadolive s’est opposé au raccordement au réseau public d’assainissement de la construction à usage d’habitation existante sur un des lots issus de la division du terrain de Mme M. et M. D., aux motifs que ce raccordement aboutirait à une situation illégale car la construction ne serait pas conforme au permis accordé pour sa réalisation, se situerait en dehors du schéma d’assainissement collectif, sur un espace boisé classé, en zone naturelle, soumis à l’article NB2 et exposé à un risque d’incendie, où toute nouvelle occupation du sol serait interdite. Par le jugement dont la commune relève appel, le tribunal administratif de Marseille a annulé cette décision.

Une fin de non-recevoir est opposée en défense, tirée de l’absence de motivation de la requête d’appel mais elle manque en fait, vous l’écarterez sans hésiter.

Sur le fond, pour annuler la décision de refus, les premiers juges ont accueilli le moyen tiré de l’insuffisance de motivation en droit de l’arrêté mais nous pensons que le maire a suffisamment expressément indiqué les raisons de droit qui fondent sa décision.

La motivation formelle en droit suppose une référence expresse à une norme juridique identifiable par le destinataire de l’acte. Cette norme peut évidemment être de toute nature. Il pourrait aussi bien s’agir d’une norme écrite et elle pourrait être de toute sorte telle qu’une convention internationale, la Constitution elle-même, une charte quelconque ou encore un acte sous seing privé, un usage et ce, indépendamment de son opposabilité dès lors que peu importe, sur ce terrain de la légalité externe et de l’appréciation de la seule forme de l’acte administratif, que les motifs soient ou non bien-fondés, que d’une règle prétorienne. À notre connaissance aucune décision n’a sanctionné d’une insuffisance de motivation un arrêté de refus ayant, par exemple, énoncé les principes dégagés par les jurisprudences Thalamy ou Sékler avant de s’y fonder parce qu’ils constituent indiscutablement une motivation en droit.

En l’espèce, vous constaterez que l’arrêté indique que le raccordement serait illégal car la construction à raccorder est « irrégulière » pour ne pas être conforme au permis de construire délivré le 6 décembre 2007, qui est bien une norme juridique, située dans un espace boisé classé selon le plan local d'urbanisme, autre norme juridique, de nature règlementaire, et exposé à un risque de feux de forêt selon le portée à connaissance établi par arrêté préfectoral qui classe le terrain en zone F1 dont le règlement interdit toute nouvelle occupation du sol, qui est également un norme juridique. Alors, sans doute, ces règles de droit ne se rapportent-elles qu’à l’irrégularité de la construction faisant l’objet du raccordement et la mention du texte contenant cette norme qui s’opposerait au raccordement d’une construction irrégulière n’est-elle pas précisée dans l’arrêté. C’est probablement ce qui a fondé la solution de première instance. Mais bien qu’il soit permis d’hésiter, elle nous parait trop sévère. En effet, dès lors que le maire a expressément énoncé la règle de droit qu’il a appliquée en indiquant qu’il ne pouvait légalement autoriser le raccordement d’une construction irrégulièrement implantée, ainsi que les normes de droit qu’il estimait être méconnues par ladite construction à raccorder, il a permis à son destinataire de comprendre les raisons de droit qui fondent sa décision de refus. Les considérations de fait y figurent aussi et ne font pas débat. L’arrêté nous parait donc suffisamment motivé.

Deux remarques pour terminer sur ce point : D’abord, on peut s’étonner de la démarche des premiers juges qui, après avoir retenu un défaut de motivation en droit, ont toutefois estimé que le maire s’était fondé sans le dire l’article L. 111‑12 du code de l'urbanisme qu’ils ont ensuite jugé inapplicable en matière d’assainissement et ne conférant aucune compétence au maire pour prendre l’arrêté en litige, alors que ces dernières considérations auraient potentiellement dû conduire à s’en tenir au défaut de motivation ou à rechercher sur quel autre fondement il aurait pu prendre cette mesure de police. Ensuite, la trop grande rigueur du tribunal qui semble exiger que l’article sur lequel s’est fondé l’autorité administrative soit indiqué, nous parait difficilement conciliable avec les situations où elle agit dans le cadre général du pouvoir qui est le sien ou d’une habilitation ainsi qu’avec celles dont nous avons déjà fait état où elle entend faire application d’une règle prétorienne telle, par exemple, qu’issue des jurisprudences Thalamy ou Sékler, qui ne sont pas formalisées dans un texte pouvant être cité ou visé et dont le contenu même est le plus souvent rappelé dans les motifs des décisions défavorables.

Nous vous invitons donc à infirmer le jugement sur ce point.

Le tribunal administratif a également jugé que le refus devait être précédé de la mise en œuvre d’une procédure contradictoire faisant en l’espèce défaut.

Les premiers juges ont considéré que la demande avait été adressée au seul organisme chargé de la gestion du réseau public et non au maire et que, par suite, ce dernier n’avait pas « statué sur une demande » au sens de l’article L. 121‑1 du code des relations entre le public et l'administration qui dispense, en ce cas, de mettre en œuvre la procédure contradictoire préalable qu’il impose, à laquelle serait donc bien soumise le refus en litige, comme toute mesure de police devant être motivée au sens de l’article L. 211‑2.

Mais l’état de la jurisprudence consacre une interprétation plus large de la notion de décision « prise sur une demande ». En sont seulement exclus les cas où l’administration a spontanément décidé de prendre la mesure de police en cause, comme lorsque le maire édicte un arrêté interruptif de travaux par exemple (voyez Conseil d'État, 9 mai 2022, ministre de la Transition écologique, no 448969) ou décide de retirer l’autorisation qu’il avait accordée (23 avril 2003, Sté Bouygues immobilier, no 249712, B sur ce point) et ce même, lorsque, ignorant qu’une autorisation tacite était née, il avait entendu de bonne foi statuer sur une demande (30 mai 2007, SCI  Agyr, no 288519, B sur ce point). Malgré nos recherches, nous n’avons trouvé aucune décision du Conseil d'État fondée sur un raisonnement comparable à celui du tribunal administratif.

D’ailleurs, l’article L. 121‑2 (codification de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000) ne comporte aucun terme restreignant l’exception qu’il pose à l’obligation de mise en œuvre préalable d’une procédure contradictoire aux seuls cas où la demande aurait été directement adressée à l’autorité administrative. Il n’exclut en rien de son champ, que le législateur a délibérément défini largement, les cas où la décision a été prise à l’initiative de l’administré qui a sollicité une réponse que l’administration était tenue, y compris par son silence gardé, de formuler. En l’espèce, la décision en litige du maire n’a été déclenchée que par la demande de raccordement de l’administré et la circonstance que, du fait de la délégation de l’entretien et la gestion du réseau public d’assainissement, cette demande lui ait été transmise par l’intermédiaire de la société publique locale « L’eau des collines », est sans incidence sur le fait qu’il a été ainsi statué sur une demande au sens de l’article L. 121‑1 et qu’aucune procédure contradictoire n’avait pas à être préalablement organisée. Le jugement sera infirmé.

Ensuite, l’un des motifs du jugement d’annulation est tiré de ce que le raccordement au réseau d’assainissement n’entrerait pas dans le champ des dispositions de l’article L. 111‑12.

On l’a dit, cet article n’est pas formellement visé mais cette base légale prêté par le jugement à l’arrêté de refus n’est remise en cause par personne en appel et notamment pas par la commune qui soutient au contraire, en invoquant ces dispositions, que le maire était bien-fondé à refuser le raccordement de la construction irrégulière.

Aux termes de l’ancien article L. 111-6 repris depuis au L. 111-12 :

« Les bâtiments, locaux ou installations soumis aux dispositions des articles L. 421‑1 à L. 421‑4 ou L. 510‑1, ne peuvent, nonobstant toutes clauses contraires des cahiers des charges de concession, d’affermage ou de régie intéressée, être raccordés définitivement aux réseaux d’électricité, d’eau, de gaz ou de téléphone si leur construction ou leur transformation n’a pas été, selon le cas, autorisée ou agréée en vertu des articles précités. ».

La notion de réseaux d’eau dont il est question dans ces dispositions issues de la loi du 31 décembre 1976 est-elle limitée au réseau de distribution d’eau potable ou inclut-elle celui d’évacuation des eaux usées dénommé aussi réseau public d’assainissement ?

Dans une réponse ministérielle (no 12.735, JO Sénat du 05/08/2010, p. 2034), le Secrétariat d’État chargé de l’écologie précise que « cet article fixe une liste limitative des réseaux auxquels ces bâtiments, locaux ou installations ne peuvent être définitivement raccordés » et que « Dans la mesure où notamment les réseaux d’eau et d’assainissement sont matériellement distincts et répondent à des dispositions qui leur sont propres, il y a lieu de considérer que cet article concerne le raccordement définitif aux réseaux d’eau existants, et non le raccordement aux réseaux d’assainissement des constructions (…) ». Et notre cour qui en a déjà jugé ainsi dans un arrêt « commune de La Motte » le 3 décembre 2020 (no 18MA05101) avait pourtant appliqué ces mêmes dispositions au réseau d’assainissement dans un arrêt du 10 février 2011 (commune de Boisseron, no 09MA00590). Aucune autre juridiction d’appel ni le Conseil d'État n’a, à notre connaissance, expressément statué sur ce point.

Pour notre part, un certain nombre de raisons nous poussent à vous inviter à infirmer le jugement et à considérer que l’assainissement entre dans le champ de l’article L. 111-12 :

D’abord, la réponse ministérielle ne vous lie pas. Ces réponses constituent généralement une explicitation de l’état du droit au regard des textes et de la jurisprudence rendue, peuvent exprimer quelque fois la vision ou l’intention de leurs auteurs qu’il peut s’avérer utile de connaître et de prendre en considération mais elles n’ont ni pour objet, ni pour effet, d’imposer au juge, dont c’est l’office, une interprétation donnée d’une règle de droit.

Ensuite, votre arrêt de 2021 est isolé, contraire à l’arrêt de 2011 et non fiché. De plus, les conclusions du rapporteur public ne font aucunement état de ce qu’une réflexion particulière aurait été menée autour de la question délicate de l’interprétation de l’article L. 111‑12.

Par ailleurs, le rapporteur public du Conseil d'État, Marie Sirinelli, lorsqu’elle a eu récemment l’occasion de présenter de manière très complète les contours de l’état du droit relatif à l’application des dispositions des articles L. 111‑6 devenu L. 111‑12, n’a en aucune manière réservé un sort particulier au réseau public d’assainissement, ni même fait état de la réponse ministérielle précitée (voyez ses conclusions sur Commune d’Esbly, 23 novembre 2022, no 459043, B sur la notion de raccordement définitif au sens de ces dispositions).

Et puis vous serez attentifs à l’objectif poursuivi par le législateur. Comme l’indique François Séners dans ses conclusions rendues sur la décision M. C. (12 décembre 2003, no 257794) ces dispositions « tendent à éviter le mitage et à faire obstacle, de façon plus générale, à ce que les raccordements aux réseaux publics puissent aboutir à conforter des constructions irrégulières ». C’est aussi ce que juge le Conseil d'État en indiquant que le « motif d’intérêt général poursuivi par cette interdiction de raccordement aux réseaux […] consiste à assurer le respect des règles d’utilisation des sols en faisant obstacle à ce que le raccordement de propriétés aux réseaux aboutisse à conforter des situations irrégulières » (23 juillet 1993, époux S., no 125331). Ainsi, non seulement, là encore, comme dans aucune décision du Conseil d'État ni aucune conclusion de rapporteur public, il n’est fait cas particulier du réseau d’assainissement, mais surtout on ne voit pas, au regard de l’objectif de lutte contre le mitage et d’obstacle au confortement des constructions irrégulières, ce qui justifierait que le maire ne puisse pas s’opposer au raccordement au réseau public d’assainissement d’une construction illégale dont l’existence même se verrait ainsi confortée. Si l’assainissement présente sans doute des enjeux de salubrité publique, il n’est pas évident que ces derniers soient plus sensibles que ceux inhérents à la desserte en eau potable ou en électricité, d’autant que ces considérations n’impliquent pas nécessairement la desserte des constructions par un réseau public et peut s’accommoder de dispositifs d’assainissement autonomes.

En outre, la lettre de l’article L. 111‑12 ne permet pas formellement d’exclure le réseau d’évacuation des eaux usées qui, rigoureusement, constitue un « réseau public d’eau », c’est à dire un ensemble de canalisations transportant de l’eau. Le législateur, en n’ayant pas précisé si l’eau du réseau public concerné devrait être potable ou usée, a formellement couvert les deux réseaux. Cela pourrait conforter une jurisprudence qui semble accorder une portée matérielle et temporelle particulièrement générale et peu conditionnée au champ de ce texte. Le CE a, par exemple, considéré qu’il résulte de ces dispositions

« que le maire peut s’opposer, dans le cadre de ses pouvoirs de police spéciale, et alors même que l'infraction pénale constituée par la construction sans autorisation serait prescrite, à un raccordement définitif aux réseaux publics des bâtiments, locaux ou installations dont la construction ou la transformation n’a pas été régulièrement autorisée ou agréée selon la législation en vigueur à la date de leur édification ou de leur transformation, ni régularisée depuis lors » et « qu’eu égard au motif d’intérêt général poursuivi par cette interdiction de raccordement aux réseaux, qui consiste à assurer le respect des règles d’utilisation des sols en faisant obstacle à ce que le raccordement de propriétés aux réseaux aboutisse à conforter des situations irrégulières, et alors même qu’elle s’applique à tous les bâtiments, locaux et installations irrégulièrement construits ou transformés, quels que soient la date de leur édification, leur destination ou leur usage et que le législateur n’a prévu aucune prescription, les dispositions de l’article L. 111-6 du code de l’urbanisme ne soulèvent aucune question sérieuse au regard du droit de propriété garanti par la Constitution »

(23 mars 2016, M. L., no 392638).

De plus, ces dispositions doivent s’interpréter à la lumière du dispositif établi par le code de l'urbanisme. Elles sont situées dans le chapitre consacré au règlement national d’urbanisme dans la section « localisation, implantation et desserte des constructions et aménagement », au sein de la sous-section « Desserte », qui ne compte que trois articles L. 111‑11, 12 et 13. L’article L. 111‑13 concerne spécifiquement le réseau public viaire. Mais l’article L. 111‑11 dispose lui que :

« Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés ».

Vous aurez noté que le législateur a qualifié précisément chacun des deux réseaux publics de « distribution d’eau » et « d’assainissement ». S’il avait entendu restreindre le champ du L. 111‑12 au seul réseau de « distribution d’eau », il lui était loisible de le faire au lieu de traiter des « réseaux (…) d’eau ». Et puis tel que cela ressort de l’état de la jurisprudence constante que vous appliquez du reste fréquemment, en édictant l’article L. 111‑11, le législateur a permis à l’autorité administrative, même en présence d’un projet de construction respectant les règles d’utilisation ou d’occupation du sol, de s’opposer à sa réalisation si son raccordement aux réseaux publics, y compris d’assainissement, contraint la commune la réalisation de travaux publics excédant le simple branchement qui ne sont pas prévus et qu’elle ne souhaitent pas devoir financer du seul fait d’une initiative privée. Il serait donc assez peu logique de permettre au maire de s’opposer aux demandes d’autorisation de réaliser des projets de construction, respectueux des autres règles d’urbanisme, faute de possibilité ou facilité de leur raccordement au réseau public d’assainissement, mais de lui interdire de refuser de raccorder à ce même réseau les construction édifiées ou transformées sans autorisation alors même, précisément, que cette absence de demande d’autorisation a permis de contourner l’article L. 111‑11 applicable à l’assainissement. Vous pourriez donc vous fonder sur la combinaison des articles L. 111‑11 et 12 pour affirmer que le champ de ce dernier s’étend aux réseaux publics de distribution d’eau potable et d’évacuation des eaux usées.

Enfin, nous pensons qu’à supposer même que vous suiviez l’interprétation de l’article L. 111‑12 retenue par le Tribunal administratif, elle ne saurait imposer au maire de faire droit aux demandes de raccordement au réseau public d’assainissement des constructions irrégulières. Il nous semble, en effet, tout à fait inenvisageable de contraindre les communes à financer la réalisation puis l’entretien extrêmement couteux d’une nouvelle partie de son réseau d’assainissement pour ne desservir qu’une construction illicite, quelle que soit la distance du raccordement à réaliser ou les contraintes techniques liées à sa localisation, quel que soit le gestionnaire ou les délais connus ou non de réalisation de ces équipements publics au sens de l’article L. 332‑6 du code de l'urbanisme. Si ce n’est pas sur le fondement du L. 111‑12 alors le maire peut sans doute s’opposer à tel raccordement au réseau d’assainissement sur le fondement d’autres dispositions de police spéciale de l’urbanisme. Ainsi, face cette forme d’évidence, n’est-il pas plus simple, puisque cette article L. 111‑12 existe, qu’il traite précisément de la question, que sa lettre de l’article ne s’y oppose pas et que différentes considérations le justifient, de considérer que les réseaux d’eau dont s’agit incluent aussi bien ceux de distribution d’eau potable que d’évacuation des eaux usées ?

Le motif du jugement sera donc infirmé.

Un dernier motif semble avoir été soulevé d’office par le tribunal qui, poursuivant son raisonnement, a estimé que le maire n’était pas compétent pour s’opposer au raccordement au réseau d’assainissement sur le fondement du L. 111‑12. Or, comme cela a déjà été dit, ces dispositions s’inscrivent dans le cadre du pouvoir de police spéciale de l’urbanisme du maire et lui permettaient de refuser le raccordement au réseau d’assainissement. Le jugement sera à nouveau infirmé.

Saisis par l’effet dévolutif de l’appel, il vous faudra statuer sur les moyens de première instance.

Mme M. et M. D. soutiennent que la division foncière de leur terrain à laquelle ne s’est pas opposé le maire serait légale et définitive et leur confèrerait le droit de construire sur les lots concernés mais le refus de raccordement qui concerne une construction existante n’est pas fondé sur le droit à construire sur les lots issus de cette division mais sur la non-conformité au permis délivré en 2007 de la construction à raccorder.

Ils avancent également que le certificat d’urbanisme obtenu le 28 octobre 2015 avant la non‑opposition à déclaration préalable valant division de leur terrain ne mentionnait pas de difficulté de branchement au réseau d’assainissement mais cette circonstance est sans incidence sur la légalité du motif opposé par le maire tiré de l’irrégularité de la construction existante à raccorder.

Les appelants soutiennent que le maire devrait établir la non-conformité de la construction au permis délivré en 2007 mais la charge de la régularité d’une construction existante devant faire l’objet de travaux dans l’hypothèse de la jurisprudence Thalamy ou d’un raccordement aux réseau publics dans le champ d’application de l’article L. 111‑12 incombe à son propriétaire. Ici, la preuve de la conformité de la construction au permis n’est pas rapportée et pour ce seul motif, le maire pouvait à bon droit s’opposer à son raccordement.

Ainsi, et sans qu’il soit besoin de statuer sur la légalité des autres motifs de refus, vous pourrez annuler le jugement et rejeter les demandes présentées par Mme M. et M. D. devant le tribunal administratif ainsi que le surplus des conclusions des parties.

Tel est l’état de nos conclusions dans cette affaire.

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