Choix du barème de capitalisation 2013 et respect du principe de réparation intégrale

Civ. 2e, 10 décembre 2015, n° 17-27.243, n° 17-27.244

DOI : 10.35562/ajdc.704

Index

Mots-clés

préjudice futur, évaluation sous forme de capital, nécessité de prendre en compte l’inflation

Rubriques

Réparation intégrale

L’arrêt rendu le 10 décembre 2015 par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, publié au Bulletin, ne laissera pas indifférent les spécialistes du dommage corporel et particulièrement les avocats de victimes puisque la Haute juridiction était amenée à se prononcer sur une question présentant un enjeu majeur dans la liquidation des préjudices de la victime : le choix du barème de capitalisation.

Rappelons à ce titre qu’une victime est en droit d’obtenir en principe la réparation intégrale de son dommage ce qui implique une indemnisation de ses préjudices temporaires et permanents, la césure entre ses deux périodes étant marquée par la consolidation qui correspond à la date de stabilisation des lésions de la victime, lesquelles prennent un caractère définitif (passage d’un état lésionnel à un état séquellaire).

S’agissant des préjudices patrimoniaux permanents, il convient de les capitaliser au moyen d’un barème dit de capitalisation.

Il n’existe en cette matière aucun barème officiel ou légal. Ainsi s’instaure dans le débat judiciaire, une véritable bataille des barèmes entre les avocats de victimes et les avocats d’assureur.

C’est tout l’enjeu de l’arrêt commenté.

En l’espèce, de cour d’appel de Toulouse avait fait application du barème publié à la Gazette du Palais en mars 2013 (version antérieure : Gazette du Palais 2004 et 2011) pour liquider les préjudices permanents d’une victime d’un accident de la circulation.

Ce barème, élaboré par Maxime Bereire, actuaire-conseil, expert près la cour d’appel de Versailles (Gazette du Palais, 28 mars 2013, n° 87, p. 22) a pour objectif clairement affiché de « s’adapter à la conjoncture économique existante, à l’évolution de la durée de la vie humaine et aux pratiques des juridictions », et se fonde sur :

  • les données définitives de la table Insee les plus actualisées à savoir les tables 2006-2008 (France entière) ;
  • un taux de 1,20 % tenant compte de l’inflation.

L’assureur formait un pourvoi contre cette décision contestant l’application du barème 2013 au taux de 1,20 %, lui préférant l’application du taux d’intérêt TEC 10, plus élevé. Au soutien de son pourvoi, la société P. reprochait notamment au barème Gazette du Palais de tenir compte de l’inflation dans la détermination du taux retenu.

La question soumise au juge présentait un enjeu majeur puisque le barème Gazette du Palais 2013 est appliqué par de nombreuses cours d’appel et notamment :

La Haute juridiction approuve la solution retenue par la cour d’appel de Toulouse au motif que le choix du barème de capitalisation relevait de son pouvoir souverain d’appréciation.

Ainsi, le débat sur l’opportunité d’appliquer tel ou tel barème demeure une question soumise à la libre discussion des parties dans le cadre du débat judiciaire et in fine à l’appréciation des juges du fonds qui demeurent libre de déterminer quel barème leur paraît le plus adapté.

Cette décision de la Cour de cassation met un coup d’arrêt à la tentative des assureurs d’obtenir la neutralisation du barème Gazette du Palais 2013 et de son taux de 1,20 %.

Ainsi, la guerre judiciaire des barèmes continuera à avoir lieu, n’en déplaise aux assureurs !

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Citer cet article

Référence électronique

Quentin Mameri, « Choix du barème de capitalisation 2013 et respect du principe de réparation intégrale », Actualité juridique du dommage corporel [En ligne], 6 | 2015, mis en ligne le 31 janvier 2016, consulté le 28 mars 2024. URL : https://publications-prairial.fr/ajdc/index.php?id=704

Auteur

Quentin Mameri

Avocat au Barreau de Paris, F-75017, Paris, France

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