A propos des différentes modalités d’une prise d’acte

Etude

DOI : 10.35562/bacage.475

Résumé

L’analyse d’une quarantaine d’arrêts rendus, sur le premier semestre 2022, par la chambre sociale de la Cour d’appel de Grenoble fait apparaître la diversité des modalités que peut prendre la prise d’acte. Le plus souvent, le salarié adresse une lettre de rupture énonçant des griefs à l’encontre de son employeur. S’ajoute, à cette modalité classique, une modalité plus atypique reposant sur une lettre de démission ou de départ volontaire à la retraite sans réserve.

Plan

Depuis sa consécration par la chambre sociale de la Cour de cassation comme mode de rupture sui generis du contrat de travail à l’initiative du salarié1, la prise d’acte continue d’alimenter un contentieux important. S’il porte principalement sur la détermination des effets de la prise d’acte selon que les manquements commis par l’employeur sont, ou non, suffisamment graves, il porte aussi sur les modalités de cette rupture.

En l’absence de toute disposition légale, seule l’obligation de notifier la prise d’acte directement à l’employeur a été posée par la Cour de cassation2. S’agissant de la forme de la prise d’acte, celle-ci est donc libre. Elle peut être orale et résulter, par exemple d’échanges avec l’employeur ou donner lieu à un écrit. En quoi consiste cet écrit ? Que doit-il contenir ? C’est à ces questions que nous allons nous intéresser en nous appuyant sur l’analyse de près de 40 arrêts rendus par la chambre sociale de la Cour d’appel de Grenoble entre le 1er janvier et le 30 juin 2022. L’examen de ces décisions fait apparaitre la diversité des modalités que peut prendre la prise d’acte. Le plus souvent, le salarié va adresser une lettre de rupture énonçant des griefs à l’encontre de son employeur (I). A cette modalité que l’on pourrait qualifier de « normale », s’ajoute une modalité plus atypique, reposant sur une lettre de démission ou de départ volontaire à la retraite sans réserve (II).

I-La modalité « normale » de la prise d’acte : une lettre de rupture énonçant des griefs à l’encontre de l’employeur

Dans la majorité des dossiers portant sur la prise d’acte soumis à notre examen, le salarié a, dès le départ, clairement manifesté sa volonté de mettre fin à la relation de travail en raison d’un ou de plusieurs manquements de l’employeur à ses obligations professionnelles. L’analyse du contentieux permet de distinguer deux types de lettre de rupture énonçant des griefs à l’encontre de l’employeur : soit, une lettre de prise d’acte au sens strict, soit, une lettre de démission ou de départ à la retraite assortie de réserves que l’on peut assimilée à une lettre de prise d’acte.

Une lettre de prise d’acte au sens strict

Il est fréquent que le salarié qualifie lui-même sa lettre de rupture de lettre de prise d’acte. Il indique à l’employeur, en des termes dénués de toute ambiguïté, qu’il prend acte de la rupture du contrat de travail c’est-à-dire qu’il décide de mettre fin au contrat mais en imputant la responsabilité de cette rupture à ce dernier.

Le contenu du courrier varie selon les affaires. Parfois, celui-ci est centré sur un manquement déterminé3, le non-paiement d’un élément de rémunération4, le non-respect des règles légales en matière de durée de travail5 ou des faits de harcèlement moral6 pour citer les cas les plus fréquents7. Il arrive aussi que ce courrier dresse une liste assez longue et diversifiée des manquements commis par l’employeur. Ainsi, dans un arrêt du 10 février8, sont évoqués pèle mêle, le non-paiement d’heures supplémentaires, mais aussi l’absence de transmission de la déclaration d’embauche, l’absence de visite médicale d’embauche, l’absence de planning des horaires, l’existence de brimades, l’absence de règlement intérieur ou encore l’absence de déclaration d’un système de vidéosurveillance. Dans une autre espèce9, la lettre de prise d’acte fait référence à la dégradation des conditions de travail, à des propos humiliants, à des avertissements injustifiés et au maintien d’objectifs alors que le salarié était passé à temps partiel10.

Dans ces affaires, la nature juridique de la rupture ne soulève pas de difficulté. La qualification de prise d’acte s’impose d’elle-même au juge : la lettre adressée à l’employeur répond en tout point à la définition donnée par la Cour de cassation : une rupture du contrat de travail à l’initiative du salarié en raison de manquements commis par l’employeur à ses obligations professionnelles11. Il n’en demeure pas moins que le rôle du juge reste essentiel. En effet, il lui incombe de déterminer les effets de la prise d’acte. En cas de manquements avérés et suffisamment graves de l’employeur, la prise d’acte produira les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou d’un licenciement nul en cas de discrimination ou de harcèlement moral par exemple. A défaut, elle aura les effets d’une démission ou d’un départ à la retraite.

Une lettre de démission ou de départ à la retraite avec réserves, assimilable à une lettre de prise d’acte

Une autre forme de lettre de rupture doit, selon nous, être assimilée à une lettre de prise d’acte. Dans un nombre plus limité d’affaires, le salarié n’a pas, à l’origine, manifesté son intention de prendre acte de la rupture du contrat de travail. Sans doute par méconnaissance des subtilités du droit du travail, il adresse simplement à son employeur une lettre qu’il identifie comme une lettre de démission ou de départ volontaire à la retraite. Ce n’est que dans un second temps, plusieurs semaines voire plusieurs mois après que le salarié conteste les modalités de rupture de son contrat de travail.

Saisi aux fins d’obtenir une requalification de cette rupture en prise d’acte, le conseil de prud’hommes va alors devoir s’interroger sur la nature juridique exacte de cette rupture, vraie ou fausse démission, vrai ou faux départ volontaire à la retraite, en recherchant quelle a été la volonté réelle du salarié. En effet, pour que la rupture du contrat s’analyse en une démission, et un raisonnement analogue peut être fait pour le départ volontaire à la retraite12, il résulte d’une jurisprudence constante que le salarié doit avoir manifesté une volonté claire et non équivoque de mettre fin, de manière unilatérale à la relation de travail13. La notion de « volonté non équivoque » implique une intention claire, évidente, dénuée de toute ambigüité quant à la réalité et au sérieux de la décision de rupture prise par le salarié et sur l’imputation de cette rupture à ce dernier14. En d’autres termes, il importe de s’assurer que le salarié n’a pas été contraint d’une quelconque manière à mettre fin à son contrat, de sorte qu’il doit supporter seul l’initiative et les conséquences de cette rupture.

Le contenu de la lettre de démission ou de départ à la retraite peut alors révéler que la rupture du contrat a été, en réalité, motivée par des manquements, des griefs formulés à l’encontre de l’employeur15. On parle parfois de démission avec réserves. Cette rupture du contrat résonne dès lors comme la conséquence que tire le salarié du comportement fautif de l’employeur. Sa volonté de rompre son contrat devient donc équivoque. Il en résulte, en application d’une jurisprudence constante de la Cour de cassation, que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement, remet en cause sa démission en raison de faits qu’il reproche à son employeur, la démission doit s’analyser en prise d’acte16. La lettre en démission ou de départ volontaire à la retraite s’apparente juridiquement à une lettre de prise d’acte. En conséquence, il importe peu que les griefs soient exprimés de manière explicite17 ou de manière plus implicite/indirecte, ce qui est le cas, par exemple, lorsqu’ à la lettre de démission est joint un décompte des heures supplémentaires prétendument dues par l’employeur18. Ce qui compte est bien l’existence de griefs à l’encontre de l’employeur.

II- Une forme atypique de prise d’acte : la lettre de démission ou de départ volontaire à la retraite adressée sans réserve à l’employeur

Il peut arriver que la lettre de démission ou de départ volontaire à la retraite envoyée par le salarié à son employeur ne contienne, même implicitement, aucun grief, aucun reproche. Faut-il considérer que l’absence de toute réserve témoigne que le salarié a bien manifesté une volonté claire et non équivoque de sorte que la démission et le départ volontaire à la retraite seraient exclusifs de toute prise d’acte ?

A cette question, la chambre sociale de la Cour de cassation a répondu par la négative. Dans un attendu de principe, repris dans les 4 arrêts rendus le même jour, elle affirme que « le juge doit, s’il résulte des circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu’à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l’analyser en une prise d’acte de la rupture qui produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d’une démission »19.

Une dizaine d’arrêts rendus par les magistrats grenoblois portaient sur une demande de requalification en prise d’acte d’une démission ou d’un départ volontaire à la retraite sans réserve20. Leur analyse permet de soulever 2 questions majeures : d’une part, en l’absence de griefs formulés dans la lettre de rupture, de quelle manière les reproches invoqués par le salarié à l’appui de sa demande de requalification en prise d’acte peuvent-ils/ doivent-ils avoir été formulés ? D’autre part, on peut s’interroger sur le point de savoir jusqu’à quel moment les griefs ou reproches peuvent être formulés après la rupture du contrat de travail.

La nécessaire formalisation d’une situation conflictuelle antérieure ou contemporaine à la rupture du contrat

En premier lieu, l’absence de toute réserve explicite ou implicite dans la lettre de rupture impose au juge de rechercher et d’identifier l’existence d’un climat de tension, d’une situation conflictuelle entre le salarié et l’employeur ayant alors amené l’un à provoquer la rupture du contrat en la mettant à la charge de l’autre. La requalification en prise d’acte suppose, en effet, que soit rapportée la preuve du caractère équivoque de la rupture du salarié. A cette fin, il est donc nécessaire de démontrer qu’un désaccord existait entre le salarié et l’employeur au moment de la rupture du contrat. La vérification de cette 1re condition liée à la chronologie des faits justifie le rejet d’une demande de requalification en prise d’acte si le manquement invoqué à l’encontre de l’employeur est intervenu postérieurement à la rupture du contrat21.

Par ailleurs, l’existence de griefs antérieurs ou contemporains à la rupture semble devoir donner lieu à une certaine formalisation22. En effet, il importe d’établir le lien de cause à effet entre les manquements de l’employeur et la décision du salarié de rompre le contrat. On peut s’interroger sur le sens de cette exigence. Faut-il considérer qu’il s’agit de vérifier que l’employeur a eu l’opportunité de rectifier la situation, de régulariser ou de mettre fin à des manquements avérés ? C’est ce qui semble se dégager de certaines décisions de la chambre sociale. Ainsi, dans un arrêt du 2 juin, la cour d’appel affirme que le lien de causalité entre les manquements et l‘acte de démission sera établi « si lesdits manquements (…) avaient donné lieu à une réclamation, directe ou indirecte, du salarié afin que l’employeur puisse rectifier la situation »23 . Une telle analyse pourrait néanmoins susciter des réserves car elle nous semble difficilement conciliable avec la position retenue par la Cour de cassation affirmant que les dispositions de l’article 1226 du Code civil (dans sa rédaction issue de l’ordonnance de 2016) ne sont pas applicables, de sorte que la mise en demeure préalable de l’employeur ne peut être une condition à la rupture du contrat de travail par le salarié24.

L’exigence d’une certaine formalisation des désaccords entre le salarié et l’employeur traduit simplement la nécessité d’établir la preuve du lien de causalité entre la rupture du contrat par le salarié et les griefs formulés à l’encontre de l’employeur. Pour autant cette formalisation est interprétée de manière souple par les juges : la preuve du désaccord peut être rapportée par tout moyen, écrit, tels que des courriers ou des SMS25 ou, verbal, comme des témoignages.

Ainsi, dans un arrêt du 16 juin, les magistrats font droit à la demande de requalification en prise d’acte après avoir considéré que la preuve d’un conflit persistant entre le salarié et l’employeur était rapportée par « de multiples échanges, des contestations explicites et circonstanciées, peu important que le courrier de départ volontaire à la retraite ne faisait état d’aucun manquement »26. A l’inverse, l’absence de tout reproche, de toute réclamation même verbale pendant la relation de travail conduira nécessairement au rejet de la demande de requalification en prise d’acte, Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 10 février,27, il est constaté qu’à aucun moment, « le contexte de tension professionnelle invoqué par le salarié n’a fait l’objet de reproches clairement et officiellement formulés pendant la relation de travail, de remontées par l’intermédiaire du médecin du travail, ou de lettres de réclamation ». Il importe de souligner que si l’employeur apparait comme le destinataire naturel de ces réclamations, il n’en est pas le destinataire exclusif. Il est, en effet, possible que d’autres personnes dans, voire hors, de l’entreprise puissent avoir été alertées, comme des représentants du personnel, le médecin du travail ou encore l’inspecteur du travail. Le témoignage des collègues voire des proches est aussi recevable sous réserve de « permettre d’établir un lien suffisant et précis entre le comportement de l’employeur les conditions réelles de travail et les ressentis du salarié »28. La preuve n’est pas non plus rapportée dans une autre espèce dans laquelle les magistrats soulignent que le salarié n’a reproché à l’employeur de ne pas l’avoir fait bénéficier d’un temps plein qu’au moment de la saisine du CPH, plusieurs mois après la démission, sans jamais l’avoir préalablement évoqué, notamment à l’occasion des différents entretiens professionnels29.

Les contours incertains du délai pendant lequel doivent être formulés les griefs à l’encontre de l’employeur

En second lieu, il convient de se demander jusqu’à quel moment les griefs ou reproches peuvent être formulés après la rupture du contrat de travail. Le temps de réaction plus ou moins long du salarié pour remettre en cause sa démission ou son départ à la retraite peut-il avoir une incidence sur ses chances d’obtenir la requalification de la rupture en prise d’acte ?

L’exigence d’un bref délai

En matière de démission, il est admis en jurisprudence que la rétractation rapide du salarié peut rendre équivoque la rupture de son contrat30. Il en est ainsi du salarié qui remet en cause sa démission dans un « bref délai », en l’espèce 8 jours31. En revanche le caractère équivoque de la démission est écarté lorsque la rétractation intervient 22 jours après la démission32 ou, a fortiori 5 semaines plus tard33.

Dans la lignée de ces arrêts, la chambre sociale de la CA de Grenoble a fait droit à la demande de requalification en prise d’acte d’un salarié qui avait, 13 jours après avoir remis sa lettre de démission, informé son employeur, par SMS, de sa décision de saisir le conseil des prud’hommes et l’inspecteur du travail au motif qu’en moins de 4 mois, plus de 30 heures ne lui avaient pas été payées34. Les magistrats soulignent que « nonobstant les remerciements exprimés par le salarié 3 jours après sa démission, il ressort notamment du message adressé dans les 15 jours à l’employeur qu’un différend existait au sujet de la rémunération et des heures supplémentaires effectuées »35.

Un délai susceptible d’être étendu à la durée du préavis ?

Existe-t-il des exceptions à l’exigence d’un bref délai ? C’est une autre affaire qui conduit à évoquer cette question36. En l’espèce, le salarié avait envoyé successivement 2 courriers annonçant sa démission et la réalisation d’un préavis de 3 mois, avec une fin effective du contrat au 17 janvier 201937. Début janvier, il adresse un nouveau courrier indiquant cette fois, qu’il considère que sa démission devait être requalifiée en prise d’acte compte tenu des faits de harcèlement moral qu’il aurait subis de manière constante depuis plus d’un an. Ainsi, plus de 2 mois après avoir manifesté sans réserve sa volonté de démissionner, le salarié évoque des manquements commis par l’employeur pour justifier la rupture de son contrat de travail et sa demande de requalification en prise d’acte38.

La réaction du salarié doit-elle être interprétée comme tardive ? Peut-on considérer, au contraire, que ce courrier apporte la preuve qu’il existait bien, au moment de la démission, des circonstances antérieures ou contemporaines à la rupture qui la rendaient équivoque ?

Une réponse semble s’imposer si l’on se réfère aux arrêts rendus par la Cour de cassation. Exerçant un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation sur la décision des juges du fond, les hauts magistrats ont affirmé que la demande de requalification en prise d’acte devait être rejetée lorsqu’un délai d’un mois s’était écoulé entre la remise d’une lettre de démission sans réserve et un courrier adressé à l’employeur lui reprochant le non-respect de certaines clauses contractuelles et de la législation en matière d’intéressement39. En présence d’un délai de 2 mois, comme dans l’affaire jugée par la CA, la condition d’un bref délai ne semble donc pas pouvoir être considérée comme satisfaite. Pourtant, les magistrats grenoblois retiennent une position différente. Ils relèvent que si le salarié ne justifiait pas s’être plaint à son employeur de faits de harcèlement moral avant cette lettre, il n’en demeure pas moins que « ce courrier, nonobstant le fait qu’il a été adressé un peu plus de 2 mois après les lettres de démission sans réserve, a, pour autant, été envoyé au cours du préavis devant se terminer le 17 janvier 2019 et il est jugé qu’il caractérise ainsi l’existence d’un conflit contemporain entre l’employeur et le salarié à la démission »40. Il en résulte qu’est ainsi caractérisée « l’existence d’un conflit contemporain entre l’employeur et le salarié à la démission ».

La décision des juges pourrait être qualifiée d’osée. Elle soulève, en tout état de cause la question de savoir comment interpréter la notion de « circonstances contemporaines » à la rupture du contrat susceptible de rendre équivoque la volonté du salarié. Faut-il se limiter aux différentes manifestations qui ont lieu avant et au plus tard au moment de l’envoi de la lettre de démission, voire dans les quelques jours qui suivent ? Faut-il privilégier une interprétation plus large et admettre que tant que la rupture du contrat de travail n’est pas effective, en raison notamment de l’exécution d’un préavis, le salarié peut encore valablement formaliser des griefs à l’encontre de son employeur justifiant que la démission puisse, par la suite, s’analyser en une prise d’acte, comme l’a fait la CA ? Il nous semble que cette 2e alternative mérite d’être approuvée. On ne peut manquer de faire un parallèle avec le licenciement. La notification du licenciement ne cristallise pas en tout point la situation du salarié. Ainsi, à titre d’exemple, la découverte ou la commission d’une faute grave pendant l’exécution du préavis autorise, en vertu d’une jurisprudence constante, l’employeur à mettre fin immédiatement au préavis et donc au contrat de travail41. Dès lors pourquoi ne pas admettre qu’en matière de démission ou de départ à la retraite, le salarié pourrait, pendant la durée de son préavis, continuer à pouvoir se prévaloir de tout manquement commis par l’employeur avant ou même pendant cette période d’exécution du contrat de travail pour remettre en cause sa démission et demander la requalification de la rupture en prise d’acte ? La notion de « circonstances contemporaines » devrait pouvoir être interprétée comme toute circonstance que le salarié évoque, tant que le contrat de travail n’est pas effectivement rompu, voire dans les quelques jours qui suivent la fin de la relation contractuelle (notamment si aucun préavis n’a été exécuté).

Notes

1 Par exemple, A. Martinel, « Ruptures du troisième type », SSL 18 septembre. 2006, no 1274, p. 8 ; F. Dumont, « Réflexions sur la construction jurisprudentielle de la prise d’acte », RJS 2014, 498 ; S. Tournaux, « L’autonomie de la prise d’acte de la rupture du contrat de travail », Dr. Soc. 2019, p 552. Retour au texte

2 Cass soc. 16 mai 2012, préc. La Cour de cassation affirme que « si la prise d'acte de la rupture du contrat de travail n'est soumise à aucun formalisme et peut valablement être présentée par le conseil du salarié au nom de celui-ci, c'est à la condition qu'elle soit adressée directement à l'employeur ». Retour au texte

Sur l‘identification de l’employeur en cas de procédure collective, voir notre commentaire, « Prise d’acte : une précision utile quant au destinataire et une confirmation attendue en cas de manquements anciens », note sous CA Grenoble, Ch. Soc. A, 8 mars 2022, Droit Ouvr. 2022, p. 339.

3 Dans certaines affaires, il est intéressant de relever le caractère assez original de certains manquements invoqués par le salarié. Par exemple, dans une affaire jugée le 27 janvier. 2022, sont invoqués, le non-respect de l'autonomie contractuelle du VRP pourtant prévue au contrat de travail, le non-paiement subséquent d'un nombre significatif d'heures supplémentaires et la persistance de pratiques commerciales demandées à Monsieur M.de nature à engendrer un risque sérieux de poursuites à titre personnel, nonobstant son contrat de travail, par des tiers ; CA Grenoble, Ch. soc. B, 27 janvier. 2022, RG n° 19/04274 Retour au texte

4 CA Grenoble, Ch. soc. B, 27 janvier. 2022, RG n° 19/04045 ; violation des règles en matière d’heures supplémentaires, CA Grenoble, Ch. soc. B, 27 janvier. 2022, RG n° 19/04551 ; CA Grenoble, Ch. soc. B, 1er février 2022, RG n° 19/02433. Retour au texte

5 CA Grenoble, Ch. soc. B, 27 janvier. 2022, RG n° 19/04045 Retour au texte

6 CA Grenoble, Ch. soc. A, 4 janvier. 2022, RG n° 19/02312 ; CA Grenoble, Ch. soc. B, 27 janvier. 2022, RG n° 19/04403 ; CA Grenoble, Ch. soc. B, 27 janvier. 2022, RG n° 19/04020 ; CA Grenoble, Ch. soc. B, 27 janvier. 2022, RG n° 19/04169 ; CA Grenoble, Ch. soc. B, 27 janvier. 2022, RG n° 19/04176. Retour au texte

7 Pour d’autres manquements :
- violation de l’obligation de sécurité ou manquements aux règles en matière de santé : CA Grenoble, Ch. soc. A, 4 janvier. 2022, RG n°19/02312, CA Grenoble, Ch. soc. B, 9 juin 2022, RG n° 20/02557, CA Grenoble, Ch. soc. A, 25 janvier. 2022, RG n° 19/01809 ; CA Grenoble, Ch. Soc B, 9 juin 2022, RG n° 20/02559
- non respect des règles légales en matière de visite médicale : CA Grenoble, Ch. soc. B, 1er février 2022, préc.; CA Grenoble, Ch. soc. B, 10 février 2022, RG n° 19/05016
- discrimination syndicale : CA Grenoble Ch. soc., 4 janvier. 2022 A, RG n° 19/02312 ;
- non respect des règles en matière de temps partiel : CA Grenoble, Ch. soc. A, 8 mars 2022, RG n° 19/02840, préc. Dr ouvr. 2022, et nos obs p. 339 ; CA Grenoble, Ch. soc. B, 9 juin 2022, RG n° 20/02557 Retour au texte

- avoir fait échec au transfert du contrat de travail en cas de modification dans la situation juridique de l’employeur : CA Grenoble, Ch. soc. B, 30 juin 2022, RG n°20.00082

- non respect de l’autonomie contractuelle du VRP, CA Grenoble, Ch. soc. B, 27 janvier. 2022, RG n°19/04274

8 CA Grenoble, Ch. soc. B, 10 février 2022, RG n°19/04977 Retour au texte

9 CA Grenoble, Ch. soc. B, 16 juin 2022, RG n°20/02659 Retour au texte

10 Voir aussi, par ex, CA Grenoble, Ch. soc. B, 24 mai 2022, RG n°20/00193. Retour au texte

11 Par ex, Cass. soc., 26 mars 2014, n°12-23.624 Retour au texte

12 Par ex, Cass. soc., 15 mai 2013, n°11-26.784 et n°11-26.930, JCP S, 2013, 1335, note D. Everaet-Dumont. Retour au texte

13 Voir par ex, Cass. soc., 5 novembre. 1987, n° 84-45.098 ; Cass. soc., 28 novembre. 2018, n° 17-21.874. Retour au texte

14 L. Drai, « La démission », Juricl. Travail, Fasc 30/20, spéc. §51. Retour au texte

15 CA Grenoble, Ch. soc. B, 16 juin 2022, RG n° 20/03152 Retour au texte

16 Cass soc., 20 janvier. 2010, n° 08-43.476. Retour au texte

17 Cass. soc. 30 octobre. 2007, n° 06-43.327 : Dans sa lettre de démission, le salarié explique les raisons qui l’ont poussé à démissionner en évoquant les actes de violence dont il a été victime. Retour au texte

18 Cass. soc., 9 mai 2007, n° 05-40.315, Retour au texte

19 Cass. soc., 9 mai 2007, (4 arrêts), n° 05-40.518, Sté Citernod, n° 05-41.324 et 05-41.325, Sté Janier ; n° 05-40.315, Sté Lacour ; JCP S 2007, 1577, étude P. Pochet ; n° 05-42.301, Sté Kent. Voir aussi Cass. Soc., 19 novembre. 20014, GP 2015, obs C. Frouin Retour au texte

Voir notamment, S. Béal, C. Terrenoire, « La démission sans réserve peut s’avérer équivoque », JCP E, 2007, 1959.

Par ex, Cass. soc., 15 mai 2013, n° 11-26.784 et n° 11-26.930, JCP S, 2013, 1335, note D. Everaret-Dumont

20 CA Grenoble, Ch. soc. B, 31 mars 2022, RG n° 20/00936; CA Grenoble, Ch. soc. A, 10 mai 2022, RG n° 20/00233, CA Grenoble, Ch. soc. B, 16 juin 2022, RG n° 18/02630 Retour au texte

21 CA Grenoble, Ch. soc. B, 19 mai 2022, RG n° 20/00034. En l’espèce, le salarié invoquait le défaut de paiement par l’employeur de l’intégralité d’une indemnité de départ à la retraite due au salarié. Retour au texte

22 Par ex, Cass. soc., 24 avril 2013, n° 11-28.398 Retour au texte

23 CA Grenoble, Ch. soc. B, 2 juin 2022, RG n° 20/02130. Retour au texte

24 Cass. soc. avis, 3 avril 2019, no 15003, RDT 2019. 328, obs. L. Bento de Carvalho.  Retour au texte

25 CA Grenoble, Ch. soc. B, 31 mars 2022, RG n° 20/00936 : Les juges constatent que « ce départ à la retraite à la date du 22 janvier 2018 est intervenu alors qu'il existait entre les parties un différend sur le temps de travail au vu d'un courriel que Madame M. avait adressé au gérant le 8 janvier 2018 en lui indiquant qu'à partir du 15 janvier 2018, elle effectuera 35 heures par semaine, après avoir rappelé que depuis environ deux semaines, elle assurait seule la tenue du magasin et à raison du fait qu'elle a réclamé dans le SMS du 22 janvier 2018 le versement des salaires impayés ». Retour au texte

26 CA Grenoble, Ch. soc. B, 16 juin 2022, RG n° 18/02630 Retour au texte

27 CA Grenoble, Ch. soc. B, 10 février 2022, RG n°19/04886 Retour au texte

28 CA Grenoble, Ch. soc. B, 10 février 2022, préc. Voir pour un autre exemple où des griefs n’ont pas été formalisés au moment de la rupture du contrat, Ch. Soc., 19 mai 2022, RG n° 20/02068 Retour au texte

29 CA Grenoble, Ch. soc. B, 19 mai 2022, RG n° 20/02068 Retour au texte

30 Cas. soc., 25 mars 2009, n° 07-44.925 ; Cass . soc., 23 janvier. 2019, n° 17-26.794 Retour au texte

31 Cass. soc., 5 décembre 2021, n° 11-14.440. Retour au texte

32 Cass. soc., 14 juin 2006, n° 03-48.413. Retour au texte

33 Cass soc., 25 mai 2011, n° 09-68.224 Retour au texte

34 CA Grenoble, Ch. soc. B, 7 avril 2022, RG n° 20/01821 Retour au texte

35 On peut aussi relever, comme le font les juges, que la lettre de démission évoquait aussi de manière implicite ce différend. Retour au texte

36 CA Grenoble, Ch. soc. B., 2 juin 2022, RG n° 20/02655 Retour au texte

37 La seconde lettre de démission, en tout point identique à la première, rectifie simplement la date de fin effective du contrat à l’expiration du préavis. Retour au texte

38 S. Bréal, C. Terrenoire, « La démission sans réserve peut s’avérer équivoque », JCP éd E, 2007, 1959 Retour au texte

39 Cass. soc., 9 mai 2007, n° 05-41.944. Voir aussi Cass. soc., 9 mai 2007, n° 04-48.029, à propos d’un délai de 3 mois Retour au texte

40 Les magistrats notent, par ailleurs, la persistance des manquements de son employeur pendant son préavis. Retour au texte

41 Par ex, Cass. soc., 25 janvier. 2005, Dr. Soc.2005, p. 269. Retour au texte

Citer cet article

Référence électronique

Christelle Varin, « A propos des différentes modalités d’une prise d’acte  », BACAGe [En ligne], 01 | 2023, mis en ligne le 23 octobre 2023, consulté le 23 juillet 2025. URL : https://publications-prairial.fr/bacage/index.php?id=475

Auteur

Christelle Varin

Maître de conférences, Univ. Grenoble Alpes, CRJ, 38000 Grenoble, France

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